Matières premières : des “3D” aux “3R”

Ces dernières années auront été marquées dans les pays émergents par la triptyque Déflation – Divergence – Deleveraging. La baisse du prix des matières premières a contribué à accentuer les pressions déflationnistes sur les économies émergentes. La divergence entre le ralentissement de l’activité et la reprise de l’économie américaine a favorisé une appréciation du dollar américain d’où un regain du coût de financement pour les pays émergents, dont une partie de la dette externe est libellée en dollar. Les entreprises ont ainsi été conduites à deleverager – se désendetter – d’où de moindres investissements et une demande moins forte pour les matières premières. 

Début 2016, les 3R se seraient substitués aux 3D : Reflation – Réalignement – Releveraging. La reprise des prix des matières premières (reflation), les craintes sur les risques de récession aux Etats-Unis ont conduit à une moindre divergence entre les économies (réalignement) et une forte reprise du crédit en Chine (releveraging).

Cette transition des 3D aux 3R ne semble pas durable car elle supposerait que la hausse du prix des matières premières se maintienne. (1) La baisse de la production de baril de pétrole n’est pas suffisante pour affecter durablement les prix. (2) Les stocks aux Etats-Unis restent à des niveaux très élevés. (3) La hausse supérieure de 30 % du prix du baril de brent ces dernières semaines serait davantage soutenue par une baisse de l’offre que par une hausse de la demande. Or, l’offre n’étant pas inférieure à la demande, de nouvelles pressions haussières semblent exclues. (4) La croissance chinoise reste soutenue par un excès de crédit qui s’est accentué en janvier. Pour favoriser la transition vers plus de consommation privée, le gouvernement chinois cherche à réduire le stock de biens immobiliers disponibles en assouplissant les conditions financières, ce qui alimenterait une hausse du prix de l’immobilier, génératrice d’effet richesse et donc de confiance des consommateurs. Cependant, la demande chinoise en matières premières n’a pas durablement, ni significativement, augmentée.

Cette transition des 3D aux 3R ne semble pas plus soutenable si nous observons les fondamentaux macroéconomiques. La divergence avec les Etats-Unis persiste : le marché du travail américain est performant, les prix immobiliers augmentent durablement, la consommation soutient l’activité et l’inflation a déjà atteint la cible de fin d’année de la FED. Seul un ralentissement du secteur manufacturier peut alimenter l’argument d’une moindre divergence. L’incertitude actuelle devrait se corriger et contenir la pression haussière sur le prix de l’or. Il y a bien reflation du prix des matières premières, mais aucun réalignement n’est observé. 

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