Résumé et Q&A sur les actions de la BCE du 10 Mars

Résumé des décisions de la BCE ce 10 Mars:

Le 10 Mars 2016, la BCE a pris 6 mesures (les plus pertinentes en gras):

-          1) Baisse du taux refi de 0.05% à 0% (voir notre éclairage ici sur les différents taux de la BCE) et 2) du taux de facilité de prêt marginal à 0.25%

-          3) Baisse du taux sur la facilité de dépôt de -0.3% à -0.4%

-          4) Le QE passe de 60 milliards à 80 milliards d’euros d’achats mensuels

-       5) La BCE va désormais acheter des obligations d’entreprises non-financières, de qualité « investment grade » donc dits « relativement sûres ».

-          6) Une série de 4 nouveaux « TLTRO » (prêts de 4 ans accordés par la BCE aux banques) sera menée chaque trimestre à partir de juin 2016.

Questions / réponses sur les décisions de ce 10 Mars:

              -          Si nous devions en rentenir qu'une, quelle mesure est la plus importante?

La dernière (TLTRO) parait la plus intéressante. Les banques pourront en effet obtenir des emprunts de long terme à des taux très bas (le taux est fixé au niveau du taux refi au niveau de l’emprunt, soit en théorie 0% lors des premiers prêts). Comme l’a répété Draghi, cette mesure est très importante dans un environnement où les coûts de financement pour les banques sont très volatiles. Ces prêts assureront à la fois une stabilité supplémentaire pour les banques et des coûts de financement très faibles, ce qui devrait permettre à la fois de soutenir l’offre de crédit et de maintenir les taux sur les prêts à des niveaux bas.

-          Pourquoi avoir baissé le taux refi ?

La baisse du taux refi est quasi-uniquement liée au nouveau programme de TLTRO : baisser le taux refi permet de rendre les prêts TLTRO plus attractifs pour les banques, puisque le coût des emprunts pour les banques est à la base égal au taux refi. La baisse du taux refi n'a autrement aucun impact significatif dans le contexte actuel où les liquidités sont abondantes (effet marginal sur l'EONIA).

-          Pourquoi avoir baissé le taux sur la facilité de dépôt ?

Clairement, l’objectif visé ici est la baisse du taux de change (en plus de l’effet signal) (attention aux confusions, voir notre poste ici). Les marchés ayant toutefois été refroidis par les propos de Draghi, l’effet sur le taux de change a très vite été masqué par ces nouvelles anticipations.

-          Pourquoi ne pas avoir mis en place un système de taxation partielle des dépôts des banques ?

Certains l’attendaient, mais la BCE n’a pas franchi ce cap. Elle aurait pu n’appliquer le taux négatif qu’à une partie des liquidités excédentaires des banques via ce qu’on appelle un système de « taxation partielle ». Ce système a certains avantages, il permet notamment de diminuer les effets pervers des taux négatifs. Pour autant la BCE n’a pas choisi de mettre en place un tel système. Pourquoi ? A cause de « la complexité inhérente d’un tel système dans le contexte de la zone euro » d’après Draghi. Potentiellement, Draghi a pu bluffé sur ce point pour surprendre les marchés dans le futur. Il semble vraisemblable qu’une baisse du taux sur les dépôts à l’avenir ne pourrait se faire qu’avec un système de taxation partielle des réserves.

-          Pourquoi la BCE a inclus les obligations d’entreprises à son programme ?

Cela a certainment uniquement à voir avec la mesure 4) : l’augmentation des montants achetés via le QE. La BCE veut simplement s’assurer qu’elle aura assez d’actifs à acheter, elle a donc élargi le QE aux obligations d’entreprises. (considérer que "la mesure a pour effet d'agir enfin directement sur les taux d'intérêts liés aux obligations d'entreprises" reviendrait à oublier que la baisse des taux sur obligations souveraines permet également la baisse des taux sur obligations d'entreprises en pratique).

Julien Pinter est chercheur en Economie monétaire à l'Université de Minho. Il était auparavant chercheur invité à l’Université de Harvard et à la Charles University de Pragues. Il est docteur diplômé de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il travaille sur des questions liées aux politiques monétaires, aux régimes de change et à la communication des banques centrales. Il a des expériences de travail à la Banque Centrale Européenne et à la Banque de France en particulier. Il a été visiting researcher à l'Université d'Amsterdam, a travaillé à l'Université de Bruxelles Saint-Louis et étudié à l'Université de Stockholm.

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